Enjeux économiques de l’énergie nucléaire
Institut de technico-économie des systèmes énergétiques CEA/DEN/I-tésé
Le lecteur assidu des articles sur l’économie du nucléaire constatera sans nul doute combien est différent aujourd’hui un article sur ce sujet de ce qu’il aurait été il y a seulement 3 ou 4 ans. Plusieurs événements d’ampleur considérable sont en effet intervenus depuis : traduction effective dans le système français des directives sur la concurrence entre producteurs d’électricité et en conséquence réflexion en profondeur sur le calcul des prix à payer par les nouveaux entrants pour accéder au nucléaire “historique”, accident de Fukushima, campagne électorale en cours avec une question jusqu’ici peu traitée relative au parc : que faut-il souhaiter en termes d’exploitation des réacteurs actuels ? Ainsi, la conséquence majeure est que la réflexion économique s’est intensifiée en regard des coûts du nucléaire existant, alors qu’il y a peu, l’économie du nucléaire était surtout abordée en termes de compétitivité vis-à-vis des autres moyens de production électriques, dans une perspective donc de construction de nouvelles centrales (une logique dite “en développement”).
Cet article reflète très nettement cette nouvelle tendance et une place importante est donnée à l’économie du nucléaire existant. La question de son coût (ou de ses coûts) est présentée en détail. On constate une augmentation certaine des coûts, au regard des évaluations encore récentes : elle est notamment la conséquence de la meilleure prise en compte des coûts de maintien du parc, de démantèlement et de stockage des déchets. Le nucléaire historique produit son énergie pour un coût courant économique de l’ordre de 50 euros/MWh, selon le rapport récent de la Cour des Comptes sur l’économie de la filière nucléaire, hors les options de rénovation possibles. En comptant toutes les rénovations envisageables, y compris induites par la prise en compte de l’accident de Fukushima, ce coût courant économique atteint 54 /MWh, sur la base de la même méthode. Il existe également d’autres méthodes de calcul détaillées dans cet article. un tel niveau est plus compétitif que les autres moyens de production existants ou en développement (hydraulique excepté). C’est ce qui explique l’intérêt économique de prolonger l’exploitation du parc actuel, tant que l’Autorité de sûreté le permet (compte tenu des travaux à réaliser et de leurs coûts).
Sous un autre angle, le rapport de la Commission “Energies 2050” évalue le coût total actualisé de l’arrêt du parc actuel, selon l’hypothèse d’une durée d’exploitation limitée à 40 ans, à de l’ordre de la centaine de milliards d’euros.
Enfin, nous terminons cet article par un regard sur les coûts actuels des réacteurs en développement, dont l’EPR. Nous concluons à une augmentation significative des coûts, laquelle doit cependant être relativisée.
Au total, le nucléaire ne fait pas exception dans l’évolution des coûts de la production et de la distribution d’électricité en France et dans le monde : les évolutions récentes marquent une tendance significative à la hausse. Malgré cela, cette source d’électricité est la plus compétitive quand il s’agit du parc existant, et de loin, et reste l’une de plus compétitives si l’on considère des unités en développement.
© SFEN 2012