La fusion, une source d’énergie pour le 21ème siècle
21st Century Energies: the Potential of Fusion
CEA, Gif-sur-Yvette (France)
- Les besoins mondiaux en énergie vont croître de manière inéluctable au cours de ce siècle du fait de l’augmentation de la population, des nouveaux besoins des pays émergents et en développement et plus généralement de la légitime aspiration des peuples à élever leur niveau de vie dont l’énergie est un facteur déterminant.
Mais, cette croissance doit être rendue conciliable avec d’une part l’épuisement à l’échelle du siècle des ressources fossiles qui représentent environ 85 % de notre consommation, et d’autre part, le respect de notre environnement soumis aux agressions anthropiques telles que l’accroissement de l’effet de serre, de façon à assurer un développement durable.
Pour répondre à ces besoins futurs en énergie, un des challenges majeurs de notre époque, l’approche la plus raisonnable est de faire des économies d’énergie, de diversifier les sources d’énergie et d’accentuer la R&D sur les sources actuelles ou nouvelles, fossiles, renouvelables et nucléaires, voire leur combinaison.
- Capture et séquestration du gaz carbonique émis par les énergies fossiles, utilisation de la biomasse, de l’énergie solaire, de la puissance des vents et marées, et de l’hydrogène comme vecteur d’énergie… font déjà l’objet de nombreux travaux encourageants, mais il reste à rendre ces formes nouvelles d’énergie compétitives avec celles d’aujourd’hui.
- Récemment, l’énergie nucléaire qui s’appuie sur un demi-siècle d’expérience, bénéficie d’un renouveau d’intérêt, qu’il s’agisse de la fission ou de la fusion nucléaire. En France, ce renouveau s’illustre par : les résultats remarquables de la R&D sur le cycle du combustible ; la nouvelle loi sur la gestion durable des matières et des déchets nucléaires décidant d’explorer en priorité le traitement des combustibles usés et le stockage des déchets résiduels ; le lancement de la construction de l’EPR à Flamanville, réacteur de troisième génération ; la décision de participation française au programme de coopération international Génération IV qui met l’accent sur le développement de réacteurs à neutrons rapides innovants.
- L’ensemble des actions ci-dessus, objet de nombreuses collaborations européennes et internationales, vont modifier, dans les décennies à venir, le secteur de l’énergie qui prend de plus en plus un caractère stratégique et géopolitique comme en témoigne la politique des Etats pour réduire leur dépendance vis-à-vis de ceux qui détiennent les ressources fossiles, pétrole, gaz, charbon. C’est pourquoi l’énergie de fusion nucléaire, dans la perspective des siècles et des millénaires à venir, apparaît aujourd’hui comme une source d’énergie à fortes potentialités. Objet de travaux de recherche en progrès constant depuis un demi-siècle, sans rencontrer d’obstacles rédhibitoires, et après les performances obtenues sur plusieurs installations telles que JET et Tore Supra, son étude aborde une nouvelle étape avec le projet Iter.
Sous réserve de maîtriser à la fois le plasma thermonucléaire du réacteur à fusion et la nature des matériaux qui le constituent pour qu’ils résistent aux flux thermique et neutronique émis par ce plasma, cette source d’énergie offre des avantages : combustible, deutérium et lithium, pratiquement disponible en quantité illimitée et bien distribué sur notre planète ; absence intrinsèque de risque d’emballement du réacteur ; quantités limitées de déchets nucléaires de faible et moyenne activité perdant leur activité à l’échelle du siècle ; absence d’émission de gaz à effet de serre ; estimation d’un coût de l’électricité produite, compétitif, lorsqu’on tient compte de l’ensemble des externalités.
Tout récemment, le 24 mai 2006, à Bruxelles, les sept partenaires du projet Iter (Chine, Corée du Sud, Etats-Unis d’Amérique, Fédération de Russie, Inde, Japon et Union européenne) ont paraphé l’accord international traitant de sa construction, de son exploitation et de son démantèlement sur les 40 ans à venir. Parallèlement un effort substantiel sera consacré à l’étude des matériaux pour le réacteur électrogène, afin d’être à même, en cas de réussite d’Iter, d’entreprendre au plus tôt la réalisation d’un réacteur prototype, dit DEMO, suivie de celle d’un réacteur commercial, avec l’objectif que la fusion, nouvelle source d’énergie, pénètre le marché avant la fin du siècle.
Abstract
- Global energy needs will inevitably increase over the course of this century due to an increasing population, to emerging countries’ growing needs and, more broadly speaking, to people’s legitimate aspiration to improve their standard of living, an aspiration which is largely aided by access to energy.
However, we must reconcile this demand created by growth with this century’s gradual exhaustion of fossil fuel resources, which account for approximately 85% of our energy consumption, as well as with concerns for our environment, damaged by the greenhouse effect and other impacts of human abuse, with a goal of achieving sustainable development.
In order to meet these future energy needs, one of the major challenges we are facing is finding a reasonable solution, be it cutting back on energy consumption, diversifying the sources of energy we use or focusing R&D efforts on current or new sources, on fossil, renewable and nuclear energies, alone or in combination with other sources.
- New promising research has been carried out on these new technologies, which includes the capture and sequestration of carbon dioxide emitted by fossil fuel sources, the exploitation of biomass, solar, wind and tidal resources and the use of hydrogen as a vector of energy, but these new forms of energy have yet to be made competitive in comparison with today’s resources.
- Recently, renewed attention has been given to nuclear energy, both fission and fusion, which is backed up by half a century of experience. In France, this heightened interest is striking. R&D has made remarkable progress on the fuel cycle, and a new law provides for the sustainable management of nuclear waste material, with a priority concentration on spent fuel processing and residual waste disposal. Construction of the Flamanville EPR, a third-generation reactor has just been launched, and France has decided to participate in a Generation IV international cooperation programme, which will focus on the development of innovative fast neutron reactors.
- Over the coming decades, these actions, which are the fruit of several European and international partnerships, will transform the energy sector, thus meeting increasingly vital strategic and geopolitical imperatives as Nations strive to reduce their reliance on majority holders of fossil, oil, gas and coal resources. This is why today, nuclear fusion represents a high-potential source of energy for the coming centuries and millennia. Nuclear fusion has been the subject of ongoing research for half a century with no major stumbling blocks. After the impressive performance in installations such as JET and Tore Supra, the Iter project will mark a new chapter in the history of this fi eld.
This energy source, when both the thermonuclear plasma from the fusion reactor and the type of materials are controlled, thereby resisting the heat and neutron fl uxes emitted by this plasma, offers a wealth of advantages, such as: the near unlimited availability of deuterium and lithium fuel, which are both evenly distributed throughout our planet; the virtually inexistent intrinsic risk of reactor runaway; limited quantities of low and medium level nuclear waste which loses radioactivity over the century; the lack of greenhouse gas emissions; and the competitive estimated cost of electricity production, once all external factors are taken into account.
Recently, on 24 May 2006, in Brussels, the seven Iter project partners (China, South Korea, the United States, the Russian Federation, India, Japan and the European Union) signed the international accord on the construction, operation and dismantling of this reactor over the next forty years. In parallel, substantial effort will be spent studying the materials for the electricity-generating reactor so that, if Iter should prove to be a success, a prototype reactor, called DEMO, can be created as quickly as possible, followed by a commercial reactor in the goal that fusion, this new source of energy, can penetrate the market before the turn of the next century.
© SFEN 2007